L'Archange et le procureur - Christophe Bigot

Publié le par Jefka

Le premier roman de Christophe Bigot est une réussite. L'Archange et le procureur retrace, dans un style riche et accompli, les dernières années de la vie de Camille Desmoulins et de son épouse Lucile. Il s'agit d'un témoignage, livré par la mère de Lucile, à son petit-fils Horace qui est l'enfant des deux amants pris dans la tourmente révolutionnaire.
Pour tous ceux et celles qui considèrent la Révolution française comme une période bouleversante mais non moins passionnante de notre histoire, ce livre nous éclaire sur le déroulement d'une révolution qui naît dans la liesse d'une liberté acquise, puis se mortifie dans la Terreur. L'auteur nous fait entrer dans l'intimité des principales figures qui animèrent le feu révolutionnaire, en utilisant la romance dont il nous prévient qu'elle ne saurait constituer une vérité historique absolue.
Camille Desmoulins est l'homme du 12 juillet 1789, celui qui, en haranguant le peuple dans une diatribe au parfum lyrique contre le pouvoir absolu, le fît marcher vers la Bastille pour que cette dernière soit prise deux jours plus tard. L'homme est décrit comme un héros moderne, sa seule arme contre l'absolutisme n'étant que le fruit de sa plume. A ses côtés se trouve Danton, dont l'éloquence et la verve servent les idées républicaines construites puis défendues par Camille. Le roman nous fait vivre également sa relation avec Robespierre, son plus ancien ami rencontré sur les bancs du collège. Ils partagent tous deux un même idéal, mais de façon différente. Ces quelques divergences seront suffisantes pour condamner à mort Camille, ainsi que Danton. Lucile suivra également ce cortège funèbre quelques semaines plus tard.
Robespierre, accompagné de Saint-Just dont l'infamie est pertinemment brossée, sont les responsables de ces condamations prononcées par un Tribunal révolutionnaire inique. En effet, les amis d'hier sont considérés alors comme des ennemis de la Nation, à la solde de l'étranger ou contre la Vertu si chèrement prescrite par Robespierre.
Le livre est ainsi d'un grand intérêt, car il nous explique cette lente descente aux enfers qui conduit Camille et Lucile devant le rasoir national qu'est la guillotine. Au départ, la puissance des mots animent les coeurs des Assemblées, les privilèges étant abolis dans l'allégresse. Le peuple est en liesse, le premier anniversaire de la prise de la Bastille étant l'expression d'une joie collective. Puis vient le temps où la Révolution se politise, les partis se créent, et la Convention se déchire dès lors entre les Jacobins et les Girondins. Ces derniers éliminés, ils ne restent plus aux Jacobins qu'à s'entre-déchirer, car le pouvoir personnel ne saurait souffir de l'absence d'ennemis. La Terreur s'installe, et le lecteur perçoit qu'elle se nourrit des passions et des ambitions de chacun, pour n'être plus à la fin que cette Bête indomptable, qui dans un premier temps tranche ceux qui ont tenté vainement de l'approcher, puis en termine avec ceux qui ont cru la dompter.
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