L'étrange cas du Dr Jeckyll et de Mr Hyde – Robert Louis Stevenson

Publié le par Jefka

Le monde se conçoit comme un consensus entre une foule de contradictions, d'antinomies qui s'affrontant donnent naissance à autre chose. L'homme qui y appartient n'est pas exempt d'une réunion de forces dites antagonistes. Une part d'ombre sommeille ainsi en chacun de nous, en contrepoids de cette lumière que l'on se plaît à exposer au regard des autres. Même si la morale et la loi nous aident à les contraindre, nous sommes ordinairement seuls face à nos démons. Alors que se passerait-il si une solution chimique, une fois absorbée, anéantirait ces barrières destinées à nous contenir dans un espace social où la sécurité existe par convention et soumission. Le Dr Jeckyll en fait l'expérience, motivé par le désir de vivre pleinement ses travers sans être contrarié par une bonne conscience revencharde. Il se transforme ainsi en Mr Hyde, un personnage hideux, pour qui le mal est sa raison d'être, jouissant d'un épanouissement qui se nourrit du malheurs de ceux qu'il rencontre sur sa route. Le supposé bon Dr Jeckyll, tel qu'il se présente et existe aux yeux de ses contemporains, n'y peut rien. Il a prêté son corps à une âme vile.

Ce dédoublement de la personnalité raconté par Stevenson pose en subtance la question de la responsabilité de l'individu. Le Dr Jeckyll est-il coupable des agissements accomplis par Mr Hyde ? Le médecin est certes sous l'emprise d'une drogue qui bouleverse radicalement son métabolisme pour créer une créature peu scrupuleuse, mais cette dernière ne prend-elle pas racine dans le tréfonds de l'esprit du savant ? L'homme est un loup pour l'homme et il peut l'être également pour lui. La responsabilité exige une intention dont il est parfois diffiçile de distinguer là où elle prend sa source. Ne pas être responsable de ses actes signifie que l'on est incapable de discernement quant aux conséquences de ses actions, incapacité induite par l'extinction d'une conscience ou parce qu'aucune morale n'a été délivrée à celle-ci. Et pourtant, c'est bien une partie de l'individu qui agit, le corps se manifeste parce qu'il est commandé. Nous sommes chacun tout en un, tiraillé entre la nuit et l'humanité. Est-il possible de séparer les deux et reconnaître que la barbarie, si elle l'a emportée, innocente l'humain qui s'est effondré ? Le Dr Jeckyll répond par la négative en se sacrifiant afin que la bête n'ait plus à sa disposition d'enveloppe corporelle. Sa responsabilté est de s'être abandonné à l'immonde alors qu'il était en pleine possession de ses moyens.

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